entendu sur France inter....et bien au moins on parle de Limoges !
Que dire ? évidemment c'est historique...Le Petit Lemovice c'est réveillé un peu sonné ! C'est vraiment une page de l'histoire de Limoges qui se tourne !
Excitation et inquiétude : excitation d'une ville qui peut être va prendre une tournant plus ambitieux, qui va peut etre se débarrasser enfin de cette image de m.... qui lui colle à la peau, d'une possible ambition économique, d'une meilleure communication, de la fin d'une mairie secrète, enfermée sur elle même, trop prudente.... Inquiétude d'une nouvelle équipe inexpérimentée, brouillonne, obligée de faire appel à l'UMP parisienne, trop "Coppé", malhabile...espérons qu'ils respecterons le travail accompli au niveau social ...espérons qu'ils auront l'intelligence de garder ce qui est bien...
Bon ben maintenant je vais râler sur Emile Roger Lomberti au lieu d'Alain Rodet ! Sans douter sur une véritable idéologie de l'ancien maire, se représenter et ne pas mettre en avant un dauphin ou une dauphine à fait perdre la gauche à Limoges !
Cette mairie sure de son action, n’était plus a l’écoute des gens et à chaque contradiction était sur la défensive et pas sur l’écoute ! Une trop confortable position de 24 ans les a perdus !
Article du Monde
Pour les uns, ce fut un « séisme », pour les autres un « coup de tonnerre » ou un « tsunami ». Comme si seul un déchaînement des éléments avait pu provoquer un tel événement. Limoges la rouge, « la Rome du socialisme », Limoges « terre de gauche », de Résistance et de luttes ouvrières a tremblé, dimanche 30 mars. La capitale limousine, socialiste depuis 1912, sauf pendant quatre années de collaboration et deux années de communisme entre 1940 et 1947, a basculé à droite.
A posteriori, tous diront que c'était « couru ». Mais il y a dix jours, les sondages donnaient encore le maire PS sortant, Alain Rodet, gagnant. Finalement c'est un inconnu du paysage politique qui l'a emporté. Emile-Roger Lomberti, psychiatre de 63 ans, s'est installé dans le vaste bureau de la mairie de Limoges, vendredi 4 avril, entérinant la chute d'un bastion, symbole d’une gauche en déroute.
Le poids de l'Histoire
Que reste-t-il des grandes heures du socialisme limougeaud ? Une série d'ouvrages, sur un étal de fortune à l'entrée de la bouquinerie de Patrick Fournière, dans l’une des vieilles rues du quartier historique de la Cité. Sur les couvertures, « 1905 », l'année des grandes grèves insurrectionnelles ouvrières, de l’occupation des porcelaineries.
Sur d’autres, la Résistance, à qui Limoges doit sa réputation de « capitale du maquis » avec sa figure de proue, Georges Guingouin, le communiste qui mena la libération de la ville en 1944. Un peu plus haut dans le coeur de la ville, « La maison du peuple » et sa mosaïque bleu et rouge porte encore les couleurs de la CGT, dans la ville où elle a été fondée en 1895. Limoges en a hérité de grandes cités ouvrières construites dans les années 1930 et un ancien théâtre coopératif, L’Union, devenu scène dramatique nationale.
Un passé connu et dont on pensait qu'il ne passerait pas. Limoges a depuis gardé l'image d'une ville de gauche, qu'a entériné la succession de ses maires socialistes. Ils n'ont été que trois à occuper ce poste depuis la Libération, laissant l’action socialiste tisser sa toile : un réseau associatif dense, des bibliothèques gratuites, une présence accentuée dans les quartiers populaires...
Le Parti socialiste est aussi, par extension, l'un des premiers employeurs de la ville, puisqu'en tant que capitale régionale, elle abrite le siège de toutes les institutions (Conseil régional et Conseil général), également tenues par la gauche.
Au soir du 23 mars, Alain Rodet est sorti en tête avec 30 % des suffrages. Un score honorable au niveau national. Un cataclysme au niveau local. En 2008, il avait élu dès le premier tour avec 56,65 % des suffrages. En six ans, il a perdu près de la moitié de ses voix au premier tour. Le parti socialiste sent alors le vent tourner. « La dynamique n'était pas chez nous », note Laurent Lafaye.
L'usure du pouvoir
Avec un tel score, la seule impopularité d'un exécutif ne suffit pas à expliquer la défaite. A la chute d’Alain Rodet, les Limougeauds ont une réponse unanime : « l'usure » et le manque de renouvellement.
Marre de « voir toujours les mêmes têtes » et en particulier celle de cet homme à la moustache aujourd’hui grise qui aura soixante-dix ans cette année, dont 25 à la tête de la mairie (1990), 43 au conseil municipal (1971) et 33 comme député (1981). Le sortant est aussi un cumulard des fonctions. Maire, député, président de la communauté d’agglomération… Une boulimie de mandats qui suscite des incompréhensions, notamment à sa gauche, surtout pour un élu qui a voté la loi limitant ce cumul.
« Franchement, je suis une fille de gauche, mais je n’avais tellement pas envie de voter pour lui au premier tour que je me suis abstenue », explique cette femme d’une cinquantaine d’année, les mains vissées à son caddie à la sortie d'un supermarché du quartier de L'Andouge, acquis jusque là à la gauche, mais où l'UMP a très largement basculé en tête dès le premier tour.
« J'ai fait faire un sondage il y a deux ans, j'avais plus de 70 % d'opinons favorables », se défend le maire sortant. Dans son opposition, la figure d’un maire « autocrate », qui n’écoute pas les voix discordantes et à qui l’entourage n’aurait pas su dire qu’il courait le risque de faire « le mandat de trop ».
Depuis deux ans, Alain Rodet doit également assumer, en tant que député, les choix de la majorité présidentielle. Il a approuvé des lois qui ne passent pas. Gilberd Bernard, du Parti communiste, cite pêle-mèle, celles sur « la TVA et les cotisations retraite ».
La sanction est ainsi d’abord venue de sa gauche. « Pour la première fois depuis 1977, les communistes ne se sont pas joints à une liste d’Union de la gauche », poursuit M. Bernard qui a conduit la liste Front de gauche.
Le FN et les "lauriers" fanés du PS
Les communistes n’ont pas été les seuls à se détourner des socialistes. Au soir du premier tour, la défection vient aussi des quartiers populaires.
Au nord de la ville, l’aménagement récent, en bord de route, du quartier de la Bastide, cache mal les chaos d’une mixité sociale qui a du mal à s’installer. A 11 h 30, l’heure de la sortie des classes, les poussettes côtoient les cabas à roulette dans un quartier principalement occupé par des personnes d’origine immigrée et des personnes âgées.
C’est dans ce quartier que, selon une cartographie élaborée par deux historiens locaux, Philippe Grandcoing et Vincent Brousse, avec le cartographe Thierry Moreau, la fracture à gauche a été la plus manifeste. Au soir du premier tour, près de la moitié des inscrits n’ont pas voté, et le Front national a atteint 30 % des suffrages exprimés.
La tempête est venue de vents que le PS n’avait jamais affrontés ; avec Vincent Gérard, le parti d’extrême droite présentait pour la première fois une liste pour conquérir la mairie, mettant au jour dès le premier tour sa capacité à mobiliser un électorat populaire.
« Moi je ne vote pas, mais ma famille, je vais vous le dire, elle a voté FN », explique cet Algérien retraité, croisé discutant à l’entrée du quartier, qui explique pudiquement être arrivé en France « dans les années 1960 ». « Regardez le quartier, rien n’a changé. » A la Bastide, dont on ne prononce pas le « s », le centre commercial abrite une boucherie halal et un tabac-presse.
Les réponses sociales ne suffisent plus
« Vous vous rendez compte que je dois prendre le trolleybus pour aller faire mes courses ! » s’insurge cette grande octogénaire qui descend la rue Pissaro, son cabas dans la main, au pas lent de sa conversation avec une voisine.
Quand l’isolement pèse, la sensation d’enfermement fait rapidement cocotte-minute. « A mon âge on veut juste de la tranquillité, pas être emmerdée au beau milieu de la nuit par des gens qui crient », ajoute-t-elle. Dans leur conversation les deux femmes évoquent les « coups de fusil », les coups de klaxon et les coups de frein des dérapages en voiture de ceux qui fréquentent ces rues. Avant de lâcher « ces gens-là sont indomptables ».
Un gamin pointe vers le bas de la rue Pissaro « c’est là que les voitures brûlent ». A quelle fréquence ? Difficile de l’évaluer. Trop pour une ville classée parmi les plus sûres de France, mais où le sentiment d’insécurité croît de manière exponentielle dès que les petites incivilités se multiplient.
Un jeu dans lequel le maire socialiste a toujours refusé de rentrer, refusant, contrairement à ses adversaires, de promettre une augmentation des effectifs de la police municipale, de l’armer, ou même d’accentuer la vidéosurveillance.
« Le PS n’a pas compris que ses réponses sociales ne suffisaient plus et que son électorat populaire attendait aujourd'hui des actions sur le plan de l’emploi et de la sécurité », analyse Christophe Grandcoing. « C’est vrai qu’on s’est peut être reposés sur nos lauriers », reconnaît Laurent Lafaye. « On n’a pas été assez à l’écoute », admet volontiers, Gülsen Yildirin conseillère municipale sortante. « Quand vous avez la tête dans le guidon, parfois vous perdez de vue ce qu’il se passe », ajoute-t-elle.
Le premiers signaux de fracture étaient pourtant apparus dès les cantonales lors desquelles le FN s’était qualifié au second tour dans quatre cantons. Une emprise confirmée, lors de ces municipales : avec 16,95 % des suffrages, le candidat frontiste, Vincent Gérard, s’est qualifié pour le second tour.
L'adversaire
Fragilisé, le PS est ainsi apparu pour la première fois vulnérable depuis de nombreuses années à Limoges. La dernière fois que son hégémonie avait été menacée, c’était en 1989, quand le RPR Michel Bernard avait failli renverser le prédécesseur d’Alain Rodet, Louis Longequeue. Dans un double contexte d’une majorité fragilisée, d’un pouvoir à l’assise en pleine érosion, une personne a compris que la droite avait cette fois-ci une carte à jouer.
A 26 ans, Guillaume Guérin, le responsable local de l’UMP, ne se « voyait pas prendre la mairie » lui-même. Un mandat « qui ne l’intéresse pas ». Il reconnaît par ailleurs volontiers être « trop à droite pour l’emporter ». L’ancien militant de l’Uni, membre de longue date de l’UMP, avait cependant sa petite idée de la stratégie gagnante. « En 1989, on a failli l’emporter parce qu’on avait quelqu’un de la société civile, il nous fallait un profil comme celui-ci. »
La carte de l'homme de la société civile
Un homme pouvait correspondre à ce profil : Emile-Roger Lomberti, pour et avec qui il a monté le plan pour « prendre la ville à la gauche ». Ensemble, ils ont construit la figure de cet « homme de la société civile », psychiatre à Limoges, sympathisant de droite mais qui n’avait pas été encarté avant de recevoir l’investiture de l’UMP pour la mairie.
Si ses collaborateurs revendiquent la « notoriété locale » de leur candidat, au bar le plus proche du siège de la fédération de l’UMP on confesse ne l’avoir « jamais vu », alors que le sortant venait « acheter son journal tous les jours ». Un inconnu qui a cependant mis K.O tous les anciens caciques de la droite locale. Confortablement installé dans un siège de la permanence de l’UMP, le nouvel élu n’hésite pas à mettre à la porte un vieux pilier du parti d’un méprisant « va-t-en l’ancien, qui c’est le maire maintenant ? ».
Il a réussi là où tous ont échoué, en faisant campagne sur son identité de « gaulliste social », se revendiquant enfant du système républicain, tout en affirmant son conservatisme. En 2013, il a signé la charte de la Manif pour tous sur la famille et se dit, à titre personnel, « contre les bébés-éprouvette ».
La campagne et la rumeur
Le ciel s’est ainsi petit à petit chargé au-dessus des socialistes. La rumeur et les « on dit » se sont chargés d’électriser l’atmosphère.
Parmi les éléments d’incompréhension récurrents qui ont fait la campagne, les Limougeauds évoquent les grands chantiers de la dernière mandature. La rénovation du stade, un investissement de plusieurs dizaines de millions d’euros, considéré comme inutile alors que la ville n’a pas d’équipe de haut niveau ni en rugby ni en football.
L’équipe sortante revendique un investissement promis lors de la campagne de 2008, qui doit offrir des infrastructures permettant le développement de nouvelles équipes, alors que les anciennes dataient d’après-guerre.
Autre chantier de la discorde : le centre aquarécréatif, une piscine de 12 000 mètres carré qui accueillera les championnats de France de natation l’an prochain. Un investissement considéré comme non prioritaire par la population en temps de crise. « Mais justement, on a fait ces chantiers pour donner de l’activité aux entreprises du bâtiment ! » se défend encore Alain Rodet. « On a mal communiqué sur notre bilan », analyse Gülsen Yildirin.
La majorité rumine ses erreurs de communication, notamment celle d’avoir laissé se propager, l’an dernier, une forme de « rumeur du 9-3 » affirmant que la ville négociait avec des institutions parisiennes pour accueillir des populations immigrées en échange d’argent. « La rumeur était tellement grosse qu’on pensait qu’elle disparaîtrait d’elle-même », poursuit Mme Yildirin. Le maire a finalement porté plainte en octobre pour en éteindre le feu, mais les braises étaient encore chaudes.
Un proche des socialistes raconte : « Alain Rodet disait souvent « le bruit ne fait pas de bien et le bien ne fait pas de bruit" ». Au risque de perdre la bataille.
La défaite
Si, depuis lundi dernier, l’UMP compte ses bulletins d’adhésions et triomphe de sa renaissance soudaine, elle peut cependant difficilement revendiquer une victoire sur son nom. « On sait que le socle d’électeurs de gauche sera toujours plus fort que celui de la droite » admet le nouveau premier adjoint limougeaud, le jeune Guillaume Guérin. Au premier tour, l’UMP n’a observé qu’une faible progression par rapport à 2008. Cinq cent petites voix en plus mais qui, s’additionnant avec celles de la liste Modem-UDI, commençaient à faire pencher la balance à droite.
C’est le deuxième tour qui l’a faite définitivement basculer, avec notamment les voix des abstentionnistes. Ont-il eux-aussi senti le vent tourner et l’occasion unique de « changer » la tête de la ville ou, de « dégager Rodet » ? Mathématiquement, ce sont ces voix et des reports de votes FN du premier tour qui ont donné la mairie à Emile-Roger Lombertie, dimanche 30 mars.
Cette victoire d’une courte tête (600 voix) laisse les Limougeauds « dans l’expectative », explique cette infirmière qui, les bras croisés sur son manteau blanc, affirme ne pas avoir voté. Dans les rues de Limoges, tous ou presque ont eu la même réaction cette semaine : « il fallait bien que ça change ».
En quelques mois, Limoges la rouge est tombée. Ses habitants « attendent » désormais de découvrir une alternance qu’ils n’ont jamais vécue. Sans émotion ni nostalgie à l’égard de son siècle socialiste.
TEXTE : Manon Rescan. PHOTOS : Ulrich Lebeuf - MYOP pour « Le Monde »
Emile-Roger Lombertie officiellement élu maire de Limoges
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